L’homme qui tua Liberty Valance & Le fils du désert par John Ford

liberty-valance Cet été, Arte nous a gavés de westerns, notam­ment de John Ford. Un bon moyen de rattra­per mon retard cinéphi­lique scandaleux.
L’homme qui tua Liber­ty Valance est un classique total. James Stewart joue un vieux sénateur adulé par ses électeurs qui rentre au pays avec sa femme pour l’enter­re­ment d’un vieil ami, inter­pré­té par John Wayne. Il raconte aux journa­listes curieux des raisons de son retour et étonné de son intérêt pour un parfait incon­nu l’his­toire vraie qui l’a conduit à la politique. ”Jeune” avocat sans le sou, il a débar­qué dans l’Ouest à la recherche d’aven­tures et de fortune. Confron­té dès son arrivée à Liber­ty Valance, un hors la loi brutal au service des grands éleveurs (excellent Lee Marvin), il refuse de le fuir ou de l’affron­ter arme à la main. Soute­nu par le journal local, une jeune femme rencon­trée au restau­rant (Vera Miles) où il travaille comme serveur et surtout un cow boy burné incar­né par John Wayne, le seul à avoir le courage d’affron­ter Valance.. Son obsti­na­tion, son refus de la violence physique, son engage­ment comme ensei­gnant lui vaut l’amour de la jeune femme, pourtant plus ou moins promise à John Wayne, et le début d’une carrière politique qui le voit s’oppo­ser aux grands proprié­taires terriens pour défendre petits fermiers et artisans. Valance, énervé par les articles qui lui sont consa­crés dans le journal tabasse le patron et Stewart décide de l’affron­ter l’arme à la main. Valance meurt et Stewart, auréo­lé de son succès dont il n’est pourtant pas fier, démarre un parcours qui le mènera au poste de sénateur. La vérité, c’est que John Wayne a tué Valance lors du duel sans que personne ne puisse s’en rendre compte, sacri­fiant son amour sur l’autel de la Justice.
Je ne vais pas faire d’ana­lyse filmique. C’est merveilleu­se­ment filmé avec une ambiance de petite ville de frontière magni­fi­que­ment resti­tuée. Les seconds rôles sont savou­reux et super­be­ment écrits (un gros shériff frous­sard et gourmand, un direc­teur de journal ivrogne et litté­raire…) et contrastent violem­ment avec le drame amoureux auquel est confron­té John Wayne. Et enfin la scène de duel est extra­or­di­naire : James Stewart est en tablier de serveur face à un Lee Marvin bourré qui l’humi­lie avant de de se faire abattre. Un seul point qui m’a un peu troublé : le film est tourné vers la fin de la longue carrière de Ford et ni Stewart ni Wayne ne peuvent prétendre jouer au jeune premier alors que le scéna­rio le sous-entend claire­ment pour Stewart en tous les cas. Vera Miles n’est pas non plus une nymphette et leur âge accen­tue l’impres­sion de jeunesse enfuie sous tendue par l’histoire.

The Man Who Shot Liber­ty Valance – Trailer

fils-desert J’avais attaqué Liber­ty Vance avec un peu d’angoisse vu que je m’étais farci quelques semaines aupara­vant Le fils du désert, toujours de John Ford avec encore John Wayne. Trois petits voleurs de vaches décident d’atta­quer une banque. Poursui­vis par le shériff, ils s’enfoncent dans le désert sans eau et assistent une femme mourante sur le point d’accou­cher. Les voilà parrains et respon­sables d’un moutard.
En fait, je n’ai pas été plus loin. Le film consi­dé­ré à une époque comme mineur dans la carrière de Ford bénéfi­cie d’un retour en grâce critique mais il ne mérite pas cet honneur à mes yeux. C’est une espèce de parabole religieuse pétrie de bonnes inten­tions et assez insup­por­table. Déjà, faire jouer à John Wayne le rôle d’un (petit) truand suffit à plomber le film. On ne croit pas une seconde que ce type puisse être dange­reux. J’ai pensé que le scéna­rio était tiré d’une comédie musicale ou un truc du genre telle­ment il est cousu de fil blanc. Les trois méchants débarquent en ville et la première chose qu’ils font c’est de se garer devant le jardin d’un quidam dont ils raillent le nom et qui se révèle être le shériff. C’est telle­ment mal amené que l’on a l’impres­sion qu’ils vont rendre visite à un vieux copain au début. John Wayne inter­dit à un comparse de tirer parce qu’il est trop jeune (il a l’air d’avoir 25 ans bien tassés). Le shériff, qui est un gars cool, refuse de leur tirer dessus mais se contente de percer leur réserve d’eau. La ”jeune” femme enceinte qui est abandon­née depuis trois jours dans un wagon est propre comme un sou neuf et fait des mines de dame patron­nesse. J’ai craqué quand, incapables de prendre une décision, John Wayne jette une Bible par terre et son copain la ramasse en disant qu’il a bien fait parce que la page ouverte leur montre le chemin. J’avoue que j’ai cru un instant qu’il allait annon­cer que la guerre en Irak était la volon­té de Dieu et que Bush avait bien eu raison de botter les fesses à Saddam. Je ne sais plus quel metteur en scène ou critique intel­lo avait dit qu’il ne regar­dait jamais un western qui était de la pure propa­gande améri­caine qui niait le génocide perpé­tré contre les Indiens (Natives) et réécri­vait l’His­toire mais je n’étais pas loin de soute­nir cette vision d’un genre pourtant fabuleux. La mise en scène de ce que j’ai vu (malgré de très belles couleurs) est un peu étrange avec toute une tirade de John Wayne qui explique ce qui se passe (vu que le scéna­riste n’a pas dû trouver de solution) précé­dé d’une espèce de gros plan incom­pré­hen­sible. Au final, j’étais persua­dé que le jeunot allait épouser la jeune fille du banquier que l’on voit débar­quer au début du film, toute pimpante et ravie de retrou­ver les bouses de vache après une année d’étude dans l’Est, mais visible­ment non. Elle sert alors à quoi cette nana ? Je ne le saurai jamais.

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8 commentaires

  1. J’ai égale­ment rattra­pé mon incul­ture crasse dans cette veine du western classique du grand John Ford.A cause de la V.O.?J’ai enfin pu savou­rer ses films.John Wayne est tout sauf cette carica­ture monocorde.Son jeu,sa voix révèlent des sibti­li­tés fortes.Lee Marvin possède une profondeur,une puissance qui me frappe plus encore​.La mélancolie,le carac­tère ”fin du jour” emballent ce récit dense ample et resté si impressionnant.”Liberty Valance” était le film préfé­ré de…Raymond Barre(Cette anecdote est aussi vraie qu’ab­so­lu­ment sans interet).
    ”Le fils du désert” est un film étrange,oui dans cette rédemption,cette voie biblique qui ne parvient jamais cepen­dant à etre ridicule.John Ford qui aura toujours travaillé sur des commandes m’appa­rait comme un immense metteur en scène.C’est ça vieillir:On arrive encore à grapiller ici et là,apprendre;quant à la fille du banquier,elle ne semble etre que l’objet d’une attente(Personnellement,je ne l’atten­dais pas)par un person­nage attachant et singulier.Pourquoi n’a t’elle pas été mieux exploitée?Coupée au montage?Des pages du scéna­rios sautées?..Des raccourcis,des ellipses urgentes,et cepen­dant ce film court dégage un charme fou alors que bourre­lé de stéréotypes…

  2. Moi j’ai bien aimé trois cowboys et un coufin, le côté bancal et grossiè­re­ment tracé ne m’a pas trop gêné, et ne sais pas trop pourquoi, mais j’ai trouvé que cette simpli­ci­té à la limite de la carica­ture servait très bien l’émo­tion, par une certaine naïve­té brute assez touchante.

  3. J’ai vu ”Le fils du désert” comme l’illus­tra­tion cinéma­to­gra­phique d’une parabole biblique, Wayne n’y étant pas trés bon.

    ”Liber­ty Vance” c’est le récit nostal­gique de la fin de l’Ouest améri­cain vaincu par la socié­té policée de la côte Est.

    Puisqu’on parle d’Amé­rique, une couver­ture russe des aventures de notre ami Tahtah, ici ;o)
    http://​rus​-bd​.com/​i​m​a​g​e​s​/​s​t​o​r​i​e​s​/​b​d​/​T​i​n​t​i​n​_​0​3​.​jpg

  4. Je trouve Liber­ty Valance plus ambigu que ça. Il y a une nostal­gie d’un Ouest sauvage mais aussi le besoin de civili­sa­tion et de culture. La leçon c’est surtout qu’on ne peut pas tout avoir.

  5. Je me demande si le fils du désert ne s’est pas fait bapti­ser ainsi pour capita­li­ser le succès de la fille du désert, chef d’oeuvre de Raoul Walsh, à moins que ce soit le contraire (les deux films ont dû sortir quasi en même temps ici).

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