The complete Terry and the Pirates 1941 – 1942 (The Library of American Comics)

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Si la période actuelle peut être consi­dé­rée comme un Âge d’Or, c’est bien celui de la réédi­tion. En prenant un peu de hauteur, la BD a besoin de se pencher sur ses classiques et on assiste à une pléiade de réédi­tions de Grands Anciens.

Milton Caniff est consi­dé­ré comme un des auteurs les plus impor­tants des États-Unis et The Libra­ry of Ameri­can Comics fait un travail magni­fique en réédi­tant l’inté­grale de Terry et les Pirates, la série qui a rendu Caniff célèbre dans son pays. Chaque très gros volume (344 pages pour celui-ci) reprend l’inté­gra­li­té des strips noir et blanc et couleurs de deux années et ajoute un dossier sur le travail de Caniff à l’époque en début de volume.

La planche couleur peut être tout aussi frustrante…

Il faut savoir que les quoti­diens publiaient six strips noir et blanc et une ”demi planche” couleur le dimanche. Ce qui deman­dait un travail de Romain. Ça s’en ressent à la lecture du livre : conçue pour une lecture rapide quoti­dienne, les décou­vrir à la suite dans un recueil n’est pas une mince affaire. Chaque strip commence en général par une case résumé de l’action et les person­nages commentent beaucoup ce qui s’est passé d’où l’impres­sion d’un surplace un peu frustrant. De temps en temps, le récit a des accélé­ra­tions au moment des scènes d’action, certains strips font un gag en une bande et Caniff sait ménager des pauses dans les moments drama­tiques. La planche couleur peut être tout aussi frustrante : Caniff pensait à ceux qui ne lisaient la série que le dimanche et on a droit quelque­fois à un immense résumé où il ne se passe rien de nouveau… Ben alors, ça vaut le coup de lire ça ou pas ? Caniff est connu pour la quali­té de ses person­nages et de ce côté-là, on n’est pas déçu. Terry, le jeune héros traverse la Chine en pré seconde Guerre Mondiale, croisant une foulti­tude de carac­tères haut en couleurs. Méchants nazis alliés des Japonais, grandes gueules burinées, excen­triques résis­tants, clowns chinois et surtout demoi­selles à la forte person­na­li­té. Caniff adore dessi­ner des jeunes femmes et les habiller. Qu’elles soient ingénues, délurées, séduc­trices ou mariées, elles ont droit à une garde robe soignée et des rôles de premier plan. Ce pauvre Terry, ado améri­cain dynamique, tombe réguliè­re­ment amoureux et a du mal à concrétiser.

On pourrait compa­rer ça au Lotus Bleu d’ Hergé qui se déroule à la même période. Alors que Tintin est desti­né aux jeunes garçons et qu’il ne croise aucune aventu­rière sexy, il a le mérite par contre de présen­ter l’aspect politique de l’époque et une vision bien plus crédible de la Chine (grâce à Tchang). Caniff utilise le concept comme décor d’aven­tures héroïques et senti­men­tales même s’il ne néglige pas les causes et les consé­quences du conflit (popula­tions civiles dépla­cées, absence de légiti­mi­té des occupants…). Mais sa Chine manque un peu de convic­tion : archi­tec­ture suggé­rée, figurants fanto­ma­tiques et monoto­nie des paysages permettent au dessi­na­teur d’avan­cer vite et bien.

On pourrait compa­rer ça au Lotus Bleu d’ Hergé …

Parce qu’évi­dem­ment, le dessin de Caniff est une des princi­pales raisons de cet achat. J’avais déjà acquis le fameux Male Call publié chez Futuro­po­lis et qui traite une période posté­rieure. Je voulais retrou­ver ces aplats noirs qui n’appa­raissent pas au début des aventures de Terry (cf. aussi le billet sur le travail de Sickles [ici]). De ce point de vue là, je ne suis pas déçu. Même s’il y a des périodes moins bien tenues (travail d’un assis­tant ?), l’ensemble est très beau et j’ai souvent été déçu par les couleurs des planches du dimanche qui manquaient de puissance graphique.
J’ai choisi pour vous une séquence où le talent de Caniff est frappant. Après quelques péripé­ties, Terry est jeté en prison et découvre la présence de Burma. C’est vraiment magni­fi­que­ment écrit et réali­sé. On remar­que­ra au passage que Burma est un person­nage déjà croisé. Caniff, sur la longueur, fait réappa­raitre des person­nages marquants au grand plaisir des lecteurs assidus mais j’avoue que le lecteur ponctuel comme moi perd en richesse des person­nages. Cette fameuse Burma est une fille de mauvaise vie qui porte un moment une chemise ouverte jusqu’au nombril sans rien dessous. J’ignore si c’était une tenue visible dans les rues de New York ou Los Angeles de l’époque ???

voix off
le chant du rossignol
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31 commentaires

  1. Il m’appa­rait de plus en plus qu’une seule page de Milton Caniff est une leçon;mélange habile de rigueur,d’enthousiasme,et où la subtilité,la virtuo­si­té nait inévi­ta­ble­ment de ce rythme sans sacri­fier le récit.Bon,c’est pas trés origi­nal tout ça mais c’est vrai que c’est une claque la ”grammaire” graphique de Caniff.Est-ce que ça impres­sion­ne­rait les plus jeunes..?Je n’oublie pas le succes­seur de Caniff,Georges Wunder,par trop souvent mépri­sé ou ignoré;Allez,hop,le cri du porte-monnaie va euh,rugir.

  2. Après la série ”Pin up” de Yann et Berthet, cette réédi­tion va certai­ne­ment en allécher plus d’un, qui ne connaî­trait pas encore notam­ment (Est-ce possible?) Caniff. Pour ma part, n’ayant que deux malheu­reuses aventures de Steve Canyon ”en magasin”, je sens que je vais craquer sous peu… (Le prix est-il très prohi­bi­tif ? Mais qu’im­porte, le travail du maître mérite qu’on fasse des efforts) La couleur ne profite pas trop aux strips. L’habi­tude de ne voir Milton qu’en noir et blanc et pas autre­ment je suppose. Revoi­là le vieux débat noir et blanc /​couleur relancé :-)

  3. C’est corri­gé Papy :-) Le prix est tout à fait abordable en passant par Amzon. Le poids est un autre problème :-) Il doit y avoir beaucoup de monde en France qui ne connait pas son travail vu que les Futuro ne vont que jusqu’aux années 38 si je ne m’abuse.

    @Julien : je préviens les amateurs : lecture ardue !

  4. Tu as fini par craquer !

    Person­nel­le­ment, je ne me fade pas tout, préfé­rant piocher dedans au hasard.

    Sinon, j’apprends à encrer avec Milton Caniff (fastoche !) sur l’excellent blog Peripe­cias de Chiquir­ri­ti­pis :

    http://​chiquir​ri​ti​pis​.blogspot​.com/​2​0​1​0​/​0​1​/​m​i​l​t​o​n​-​c​a​n​i​f​f​-​y​-​l​o​s​-​p​a​s​o​s​-​p​a​r​a​-​d​i​b​u​j​a​r​.​h​tml

  5. Comment vous faites les aminches pour envoyer des posts à 19h21 et 19h36 alors que je les lis à 18h 55 ?

  6. Burma est une brave fille, même si elle a parfois de mauvaises fréquentations. ;-)

    Sinon, sa première appari­tion se fait en 1935, dans le deuxième des 4 albums publiés par Slatkine, et je crois que ces livres ne sont pas diffi­ciles à trouver.

  7. Le blog doit être à l’heure d’été, je vais voir ça. Ben on la trouve aussi dans cette version mais je n’ai pas tout acheté :-)

  8. Ben, j’ai fait un dessin parce que le person­nage me plaît bien (surtout Gontran et ses hambur­gers) mais je n’ai aucune connais­sance parti­cu­lière de la BD.

  9. Merci à Totoche pour le lien,qui est une sainte humiliation;giflé à coups de pinceaux,nets,précis,justes et élégants…Gontran et SES PATéS!!!(oh joies des traduc­tions antiques)

  10. Curio­si­té de cette ”leçon” d’encrage de Caniff:S’ils aboutissent à un résul­tat trés diffé­rent et tous deux d’une éblouis­sante beauté(applats,encre de chine pour l’un;effets de matière pour l’autre)je note une démarche trés proche(partir d’un crayon­né sage,presque terne et grossier,puis cernant froide­ment et sans grand relief au trait noir)entre M.Caniff et Emmanuel Guibert(principalement ”La guerre d’Alan”).Toujours justes et dans le bon…
    Et pour revenir sur Caniff,certaines de ces images restent gravées dans cette vieille cervelle qu’est la mienne(Alors que Popeye,pas du tout.Y a pas un collec­tif sur HAGAR THE HORRIBLE plutot..?)

  11. @Julien :
    Hägar n’est pas encore tombé dans le domaine public, contrai­re­ment à Popeye.
    En revanche Titan Books sort une intégrale, façon Peanuts :

    J’avoue que ça me titille…
    Quelqu’un sait si une traduc­tion en français est programmée ?

  12. Oula, le retour du Totoche en pleine forme (même s’il fréquente des forums avec des éphèbes dedans). Pas super fan de Raymond. C’est bien ce collec­tif The Spirit ? Ça donne quand même envie. Et je ne sais rien d’une traduc­tion d’Hägar (du Nord).

  13. Pour les accros,on trouve encore quelques albums d’HAGAR DU NORD chez Dargaud(3 ou 4)réédités en poche il y a 20 ans(J’ai lu ou Presse pocket,j’sais plus)…Et un recueil aux éditions du Fromage(Aaah!Les éditions du fromage!).Alex raymond est à redécouvrir,son parcours est intéressant,son oeuvre sait etre admirable loin de son image ”acadé­mique”.

  14. Waouh!(comme aurait dit Lefranc avec Jacques Martin, paix à son âme)Caniff était comme moi, gaucher (Bon, c’est sans doute le seul point commun :-( …), voir ici :
    La photo ne serait pas à l’envers des fois?! Je vais y retour­ner voir de plus près. Et avec Poison Ivy de Berthet-Yann, il est droitier ? Sinon ils vont devoir tout recommencer !

  15. Il y a une bio sur Caniff de sortie en anglais. Tu peux aller y jeter un oeil. Quant à Berthet, il n’avait même pas lu Male Call, alors…

    • @julien : on voit de fort belles images de cet artiste sur le Web mais je ne vois pas trop le rapport avec Caniff en effet. D’un autre côté, on n’est pas dans sa tête :-)

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