Vampires, western et policier réfrigéré

the english cover

Novembre, temps humide et couvert. Besoin de chaleur, de boisson chaude, de plaid et de bonnes séries à regar­der. Voici ma sélec­tion du moment…

Polar Park de Gérald Hustache-Mathieu

Une série policière sur Arte et française en plus ! Bon, j’enregistre parce que les affiches placar­dées sur mon chemin pour acheter le pain sont intri­gantes et je suis curieux de savoir ce que Jean-Paul Rouve va faire là-dedans.

Twin Peaks+Fargo+Stephen King

polar park cover

Un roman­cier de polars malins (Rouve) en panne d’inspiration (il n’arrive pas à finali­ser son grand projet FBI machin chouette qui fera de lui l’égal de son idole : James Ellroy) se retrouve en pleine campagne ennei­gée à la recherche de ses origines. Un moine a des révéla­tions à lui faire. Mais le moine est mort. Et le patelin est brusque­ment terro­ri­sé par un mysté­rieux tueur qui s’inspire de tableaux célèbres. L’adjudant Louve­tot (Guillaume Gouix) ne veut pas d’un appren­ti détec­tive roman­cier célèbre dans ses pattes mais l’enquête l’oblige à accep­ter cette colla­bo­ra­tion incongrue.

La série est très rapide­ment accro­cheuse, multi­pliant les clins d’œil à diffé­rents films/​séries et princi­pa­le­ment à Twin Peaks de David Lynch et Fargo des frères Coen. Pour ces derniers, la neige partout et l’uniforme parti­cu­liè­re­ment peu tradi­tion­nel de la gendar­me­rie locale. Pour Lynch, c’est un vrai jeu de pistes qui ravira le fan. Mais que le specta­teur moyen ne s’inquiète pas, ces références n’ont pas besoin d’être saisies pour appré­cier une histoire policière très bien filmée, aux seconds rôles bien campés et qui joue le contraste avec une folie/​poésie évidente dans un univers visuel qui tire vers le polar nordique. Petit à petit, l’angoisse monte et j’ai passé au final un excellent moment. Si Gérald Hustache-Mathieu a voulu donner une leçon aux inter­mi­nables et pares­seuses séries policières de France Télévi­sion, il a plutôt bien réussi son coup. Même les chansons sont très bien (signées Stéphane Lopez) et India Hair qui joue une prof de français fan de l’écrivain est une vraie décou­verte pour moi – bien que je l’aie croisée dans d’autres films auparavant.

Polar Park | Série | ARTE

What We Do in the Shadows de Taika Waititi

what we do shadows cover

Tiré d’un film homonyme du même réali­sa­teur que personne n’a vu, What We Do in the Shadows narre les déboires de quatre vampires et d’un servi­teur qui coloquent à Staten Island (USA). C’est un mocku­men­taire (filmé comme si c’était un documen­taire) très drôle qui respecte scrupu­leu­se­ment les règles de la mytho­lo­gie vampire (les person­nages passent leur temps à attendre qu’on veuille bien les inviter à entrer – les vampires ne peuvent pas entrer dans une maison si ils n’y sont pas invités). Les effets spéciaux sont réduits mais très efficaces et les person­nages bien débiles (le contraste entre le monde contem­po­rain quoti­dien et leur point de vue d’immortel de plusieurs siècles est très réjouis­sant) et on retien­dra dans les deux premières saisons vision­nées le person­nage du servi­teur (Harvey Guillén) qui accepte les pires corvées en rêvant devenir à son tour vampire. Et qui décou­vri­ra avec stupeur son vrai talent. Il y a plein de scènes que vous racon­te­rez à vos amis à vous esclaf­fant, des invités de marque et la série en est à sa cinquième saison. Au menu : que faire lorsqu’un effrayant vampire transyl­va­nien vient vérifier que vous partez bien à la conquête des États-Unis alors que vous n’en faites rien, un combat contre des loups-garous, aider une lycéenne qui a besoin de reprendre confiance en elle, montrer aux vampires frimeurs de Manhat­tan qui est le plus cool, éviter le conseil de disci­pline vampiresque…

What We Do In The Shadows – Bande Annonce – CANAL +

Parlement de Noé Debré (saison 3)

parlement

Juste un petit mot pour dire du bien de la saison 3 de la série qui vous fait décou­vrir le Parle­ment Européen tout en vous faisant bidon­ner. En fait, cette saison tente de mettre en avant les relations entre le Parle­ment et la Commis­sion Européenne. Pas sûr qu’elle ait atteint l’objectif parce qu’elle prend un virage moins éduca­tif pour dévelop­per les person­nages de la saison 2, jouant habile­ment sur le contraste entre le sérieux suppo­sé des fonctions et le délire réjouis­sant des acteurs. Ce que j’apprécie le plus dans la série, c’est l’utilisation d’acteurs de toute l’Europe (ben oui) que nous ne connais­sons absolu­ment pas. Du coup, lorsque l’on voit le chef du groupe conser­va­teur allemand, ben on y croit. Et on rigole d’autant plus de ses tenta­tives désas­treuses pour adoucir son image. Mais le top, c’est le person­nage de Valen­tine Cantel (Georgia Scalliet), la députée française ambitieuse de la saison 2 qui revient pour briguer le poste de commis­saire à la Commis­sion et qui a beaucoup de mal à se débar­ras­ser de son arrogance tout en charme typique­ment Français. La façon dont son look évolue suivant sa position est tout à fait intéres­sant et très parlant sur le travail d’apparence que les élus et respon­sables politiques doivent assumer.

[Bande-annonce] Parle­ment, saison 3

The English de Hugo Blick

On termine avec la série western qui m’a retour­né. Après la décep­tion Godless visible sur Netflix où les thèses dévelop­pées étaient un peu cousues de fil blanc (pouvoir patriarcal/​religieux morti­fère, sorori­té, homosexua­li­té, trans­mis­sion père/​fils, mixité raciale, ouf, j’en oublie sûrement…) sans que ce soit vraiment passion­nant, j’ai mis du temps à attaquer The English dont le résumé était assez basique — une Anglaise en quête de vengeance parcourt l’Ouest États-Unien accom­pa­gné d’un ancien scout Pawnee qui espère juste un lopin de terre et la paix.

Un peu de bolognaise ?

the english cover

Comme Godless, The English débute sur un ton très spaghet­ti – dans la première, une bande de brigands dingos menés par un patriarche qui cite la Bible ravage entiè­re­ment une petite ville. Dans la seconde, Corne­lia Locke (Emily Blunt) se retrouve perdue au milieu de nulle part face à un méchant impla­cable. Mais Godless ne fait rien de ce début tonitruant, revenant vite à un clacis­sisme de bon aloi au service de thèmes contem­po­rains. Hugo Blick va, lui, jouer de cet héritage ricanant en commen­çant par le générique qui cite le western des années 1960 et les films de Sergio Leone. Violence outrée (quoique souvent suggé­rée plutôt que montrée), person­nages grotesques (et inoubliables, genre la vieille aveugle) et, surtout, une méchante remise en cause de la mytho­lo­gie wester­nienne classique.

Un des thèmes majeurs de la série, c’est la culture amérin­dienne et ce que la conquête de l’Ouest en a fait. La série se passe à une période où les guerres indiennes se terminent et l’ancien scout Eli Whipp (Chaske Spencer) incarne cette cruelle défaite. Entré dans l’armée US « pour échap­per aux tribus qui voulaient faire la peau aux Pawnees », il assiste aux massacres des Amérin­diens en silence et aspire juste à finir sa vie tranquille­ment, comme on lui a promis. Une promesse qui n’engage que lui, visible­ment. Les deux héros vont croiser de nombreux Amérin­diens qui se sont adaptés ou qui luttent encore, sans espoir. Cette diver­si­té des person­nages Amérin­diens est un des grands atouts de la série. En général, j’ai du mal à m’intéresser aux films qui abordent cette problé­ma­tique, un peu mal à l’aise devant l’angélisme un peu babacool où chacun peut y proje­ter ses combats person­nels (antico­lo­nia­lisme, antica­pi­ta­lisme, écolo­gie, retour à la terre…) en évitant de parler des sujets qui fâchent. La violence est le thème qui court tout au long de la série et les Amérin­diens font aussi partie de cet héritage qui semble conta­mi­ner tous les prota­go­nistes et les États-Unis dans son entier. Comme une malédic­tion sans fin nourrie par une avidi­té cupide sans frein.

Les histoires d’amour finissent mal, en général

En jouant la carte de l’outrance façon italienne, Blick rend la série très excitante. Au début, j’étais vague­ment agacé de voir Emily Blunt que je trouvais trop Holly­woo­dienne (en fait, j’avais juste oublié que je l’avais adorée dans Sicario et Edge of Tomor­row) mais elle assure parfai­te­ment. Son look très travaillé est intéres­sant – comment garder la dame élégam­ment habillée tout en lui permet­tant les scènes d’action – et passe tout à fait grâce à cette approche spaghet­ti. Les seuls reproches qu’on pourra faire sur cette unique saison, ce sont certaines situa­tions pas vraiment dévelop­pées et une fin assez rapide mais j’imagine que c’est en grande partie dû au format série – avec l’éventualité de saisons supplé­men­taires qui n’existeront pas, ça paraît très probable.

Reste à expli­quer pourquoi je consi­dère que The English est un des meilleurs westerns que j’ai pu vision­ner. Quelques temps après, j’ai enregis­tré la version moderne des Sept Merce­naires et, dès le début du film, la petite commu­nau­té de fermiers honnêtes et travailleurs se réunit, effrayée par un patron de mine qui les terro­rise. Et un des person­nages déclare « Nous ne laisse­rons pas faire ! Nous étions les premiers dans cette vallée ! ». Et là j’ai éclaté de rire, suppri­mé le film de mon disque dur et je suis allé me coucher. Une série qui vous influence sur la vision que vous avez du genre, ça mérite d’être salué.

The English – Bande-annonce
Partagez ce contenu

Ne ratez plus rien en vous abonnant

Soyez prévenu par mail des nouvelles publications et suivez mon actualité avec la newsletter

!ABC Pour signaler une erreur ou une faute de français, veuillez sélectionner le texte en question et cliquer sur l’icône R en bas à gauche.

fille boutique fond
fille boutique seule300b

Visit my shop

Illustrations, livres, ex-libris, planches en vente sur ma boutique.

3 commentaires

  1. Les déboires de Valen­tine Cantel (ses problèmes de ”off”) sont inspi­rés de ceux de l’euro­dé­pu­tée Natha­lie Loiseau (qui briguait la prési­dence du groupe centriste mais a dû renon­cer après avoir criti­qué en off plusieurs dirigeants européens). J’ai trouvé le clin d’œil très malin.

    • Ola, tu es pointu sur les député(e)s européen(ne)s :-) Très français en tous les cas comme compor­te­ment. Les féministes ont toujours dit qu’il y aurait égali­té lorsqu’il y aura des femmes incapables dans des postes de respon­sa­bi­li­té. On avance bien à ce niveau :-)

      • ça avait eu son petit reten­tis­se­ment à l’époque (je suis quand même allé vérifier sur wikipé­dia avant de poster :) ).

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Ce site utilise des cookies pour vous offrir la meilleure expérience possible.