Exposition Hugo Pratt à la Pinacothèque de Paris

de belles couleurs à l'ordi

Il arrive que l’été soit frais et pluvieux. Il arrive que les grands musées s’inté­ressent à la bande dessi­née. Il arrive que l’on ait envie de sortir son AK47 et de plomber les respon­sables de ce genre d’expo­si­tion en hurlant des obscé­ni­tés et en leur p*** à la gu*** en *** et *** avec délectation.
Une exposi­tion Hugo Pratt à Paris, c’est évidem­ment un évène­ment à ne pas louper. Je n’ai encore jamais écrit de billet sur un des auteurs qui m’impres­sionnent le plus, proba­ble­ment pour cause d’absence de nouveau­tés (quel fainéant), et pourtant La balade de la Mer Salée est un des albums qui m’aura le plus marqué – j’y fais une grosse référence dans le Gauguin. Après une année sans expo parisienne, il fallait bien que je me bouge les fesses (je ne suis pas en vacances) avant de le regretter.

en fait, pas sûr qu'on la voit à l'expo

C’est une belle expo avec de nombreuses aquarelles (y’a des couleurs, ça va plaire au grand public) et le clou est proba­ble­ment l’inté­grale des planches de La balade. Très impres­sion­nant, surtout que je les imagi­nais en plus grand format. En général, je ne suis pas un fanatique d’ori­gi­naux (c’est l’album qui compte) mais voir le trait de Pratt en vrai, ça donne des frissons. En même temps, après avoir passé trois jours à monter une expo Pratt à la Réunion, à soule­ver des trucs super lourds, à visser et passer des heures entre ces planches, je peux me permettre de faire mon blasé. Surtout après avoir lu l’intro­duc­tion de l’exposition.

j'ai acheté cette carte postale

À la Pinaco­thèque, ce sont des gens telle­ment épris de Culture qu’ils commencent par s’excu­ser de montrer de la BD. Et que je pleur­niche et bats ma coulpe. ”Ça ne se repro­dui­ra plus, juré, craché sur la tête de ma mère, on ne fera plus de la BD après”. ”Pratt est un VRAI artiste complet – pas comme les autres tâche­rons”. Bref, de quoi mettre de bonne humeur le moindre amateur de BD. Et nous pouvons lire sur le site officiel un magni­fique […]cet artiste hors norme, consi­dé­ré comme l’inventeur de la bande dessi­née litté­raire. La bande dessi­née litté­raire. C’est beau. J’ignore si quelqu’un a inven­té le théâtre litté­raire, le cinéma litté­raire ou la chanson française litté­raire mais la bande dessi­née litté­raire… Ça veut dire quoi ? Personne ne le sait. Ou plutôt si. Au lieu de dire ”j’adore les Schtroumpfs et le travail de Kirby », vous décla­rez d’un ton vague­ment consti­pé au micro de France Cul ”je n’ai jamais lu de BD avant d’en faire. Ce n’est pas ma culture. Je préfère Steven­son, Borgès et Gérard de Villiers.” Alors pourquoi faire de la BD ? ”C’est parce que je ne sais pas écrire”. Tout s’explique… D’ailleurs, vous ne savez pas dessi­ner non plus mais ce n’est pas grave, c’est de la bande dessi­née litté­raire, y’a pas besoin de savoir dessi­ner. Ah ben, la voilà la défini­tion de la BD litté­raire : c’est pour les gens qui ne savent ni dessi­ner ni écrire. Tout est dit. Présen­ter un Art (il parait que c’est un Art la BD) comme un objet cultu­rel sans passé ni histoire est une escro­que­rie intel­lec­tuelle inexcusable.

expo-hugo-pratt-couverture.jpg

Passons à autre chose. Je ne vais pas vous montrer le catalogue de l’expo qui est tout à fait honorable (en version annuaire des années 80 ou plus léger) mais celui de l’expo 1986 publié par les Éditions del Grifo. Je n’ai pas acheté celui de la Pinaco­thèque parce que ça aurait fait pas mal double emploi et celui de 86 me plaît beaucoup. Et il y a des dessins des Scorpions du Désert, malheu­reu­se­ment absents de la Pinaco­thèque, un des sommets de la carrière de Pratt.

elle n'est pas dans l'expo, c'est sûr

Tiens, je me rappelle aussi qu’il y a une petite vidéo où on voit Pratt causer, boire un coup et randon­ner (genre repor­tage M6 People) et qu’on affirme sans rire que Pratt a voyagé dans tous les pays qu’il a racon­té et s’est telle­ment impré­gné de leur atmosphère qu’il s’est abste­nu de faire un dessin descrip­tif. Comme je n’ai pas tout mon Pratt en tête, j’aime­rai qu’on me confirme ses voyages dans le Pacifique avant la Balade et en Chine/​Sibérie avant Corto fait son chinois sibérien.

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39 commentaires

  1. Bon d’accord, c’est un petit :-) Mais ça n’excuse rien (moi, j’habite à Orléans, hein, en province).

  2. J’en ai enten­du une belle de Michel Onfray sur la BD hier. De toute manière, il ne faut pas espérer grand chose de gens qui ont passé des années à mépri­ser le genre.

  3. Pour les origi­naux , rien à dire of course , c’est très touchant !

    Pour l’orga­ni­sa­tion de l’expo , c’est bien brouillon ( des numeros sous les origi­naux qui ne corres­pondent à rien ‚à quoi bon mette des numeros alors ? ), aucun ordre chrono­lo­gique ce qui ne met pas en valeur l’evo­lu­tion du style et des thèmes abordés par Pratt .

    La video est salement projet­tée sur un mur , une porte et un bout d’extincteur …
    L’image est crade et donc illisible .

    Et l’accu­mu­la­tion des planches de la Ballade est assez indigeste .

    Person­nel­le­ment , je fut toucher de voir ses origi­naux de légendes mais l’expo franche­ment mal foutue .…Je m’atten­dais à nette­ment mieux. Surtout concer­nant un monument tel qu’Hu­go Pratt !

  4. L’expo 86 était plus complète, visible­ment. Et celle d’Angou­lême (celle de la Réunion), compo­sée unique­ment de planches sûrement mieux organi­sée (en tous les cas, à la Réunion, c’était chouette).

  5. Bonsoir,

    Je vous écris de Madrid. Il serait possible de connaître la quanti­té d’ori­gi­naux qu’ils se sont exposés dans cette expo ?

    Je viens de retour­ner de Thiers, après visiter l’expo dediée à Toppi (je le préfère à Pratt, ainsi qu’à le grand Batta­glia), et je dois vous dire que ce a été une expérience artis­tique extra­or­di­naire. Je pense que les grands dessi­na­teurs italiens ils sont en train d’être reven­di­qués forte­ment en tout le monde, et parti­cu­liè­re­ment en France.

    Je m’excuse par mon déficient français.

    Cordiales saluta­tions.

    • Oh, diffi­cile à dire. Il y a tout la Balade de la Mer Salée, ça fait déjà beaucoup. J’avoue que je n’ai aucune idée sur la question. 200 ? 300 ?
      Bon, c’est votre premier commen­taire alors on va vous excuser pour Toppi. C’est un extra­or­di­naire dessi­na­teur et illus­tra­teur mais ses BD ne m’ont jamais tout à fait convain­cu. Trop décora­tives à mon goût :-)

  6. @Li-An : Merci par votre clémence envers cet accusé ”toppia­no”. Mais je vous demande : c’est un obstacle le décora­ti­visme pour racon­ter effica­ce­ment une histoire ? Je ne le crois pas…

    Le style du dessi­na­teur milanais, si person­nel et unique, lui permet créer des histoires dans lesquelles le temps s’écoule à un rythme distinct et propre (préci­sé­ment par le carac­tère illus­tra­tive de son travail). Ceci fait qu’il déplaise à beaucoup de gens… Mais il est capable de compter histoires magni­fiques avec efficacité.

  7. @Alberich el Negro : chacun ses goûts :-) Mais je reste persua­dé qu’une recherche de l’effi­ca­ci­té narra­tive qui va de Caniff à Franquin, Moebius ou Pratt est plus intéres­sante que les cadrages compli­qués de Toppi. De plus, je trouve que cette recherche esthé­tique n’est pas vraiment en adéqua­tion avec les histoires qu’il raconte, finale­ment assez classiques. Mais je le répète, c’est chacun ses goûts :-)

  8. J’ai ENFIN un compa­gnon de fortune pour l’amour de TOPPI(Amitiés Alberich!).
    Monsieur Li An,n’avez-vous pas honte d’iro­ni­ser sur un collègue du métier,Michel Onfray…Vous mérite­riez que Régis Debray se lance aussi dans la bd,tiens!Ahah !

  9. Il expli­quait que l’on pouvait monter des pièces avec des élèves que ce soit du théâtre classique grec ou du Labiche, du moment qu’il y avait création d’un projet cultu­rel qui permettent aux élèves de faire quelque chose ensemble (ouver­ture à la culture plus travail ensemble). Mais il fallait éviter la démago­gie en travaillant sur ”leur musique ou la BD”. Éh oui, la BD c’est au niveau du R&B et plus bas que le théâtre de Labiche… Un truc de jeune mal dégros­si quoi.

  10. J’ai l’impres­sion qu’il voulait plus parler du fait d’evi­ter une certaine ”démago­gie” envers les élèves en les faisant travailler sur des sujets qu’ils aiment ( bd ‚music etc… ) et donc les faire bosser sur des sujets ” de profs ”, plus struc­tu­rant car les obligeant à aller vers des zones incon­nues d’eux memes.

    Mais je ne vois pas là de critiques sur la bd ou la musique.

    Et person­nel­le­ment , si mise à l’écart il y avait , elle ne me dérange pas tant que ça, car cela donne leurs donnent une singu­la­ri­té à nos ”art populaire ” ;)

    Chanson , ”art mineur ” comme disait l’autre /​ Bd , ”art populaire” comme on n’entend par là…Et alors ? Why not , ça n’empêche pas les chefs d’oeuvres ces étiquettes :-)

  11. Il me semble qu’il y a des BD peu connues du grand public qui peuvent être une belle d’ouver­ture à la Culture. Si il n’y avait pas eu l’exemple Labiche (j’ai lu du Labiche), je n’aurai pas couiné autant.

  12. La mécon­nais­sance ou la condes­cen­dance des élites (et des médias) pour la BD ne m’agace plus, elle me fait douce­ment rire (un peu nerveu­se­ment, certes). Et dans le fandom BD, il y a aussi de sacrés pénibles ! Par contre, les gens qui s’occupent de revues, de festi­vals, de maisons d’édi­tions ou… d’expo­si­tion et qui racontent des conne­ries, oui, là, je comprends que ça puisse énerver.

  13. J’vais peut etre monter une expo Onfray,alors…A part cela,je suis toujours malai­sé d’entendre l’idée de culture comme ouvrage collectif,”ensemble”,”ensemble tout est possible” et autres ”L’ave­nir est pour demain”…Est-ce que cela se décrète la culture…?

  14. Il faudrait préci­ser ta pensée par rapport à ce qui précède Julien mais l’idée d’une culture par tous et pour tous est une idée assez récente qui aurait fait mourir de rire les peintres impres­sion­nistes par exemple.

  15. Voilà qui est mieux et bien formulé…Mais il faut voir dans ma pensée bredouillante une tenta­tive un peu ridicule d’observer(dénoncer?) combien notre époque semble se méfier et combattre de toutes ses forces l’idée d’un tant soit peu de solitude,d’une pensée autre,ou pire:D’une vie intérieure !
    Il me semble que Michel Onfray pose de grandes lignes,mais je vois dans les yeux de ses admira­teurs un ptit truc qui me fait un peu peur.

  16. Ce qui est intéres­sant pour moi chez Onfray (je l’écoute sur France Cul en direct live au moment où je tape ce commen­taire et il parle de Gauguin (l’éven­tuelle pédophi­lie du person­nage et il semble croire que Tahiti est une colonie comme l’Algé­rie ou le Congo belge ce qui n’est pas tout à fait vrai et sa réponse est donc un peu incom­plète). J’aime bien son point de vue sur la philo­so­phie qui est – si j’ai compris – de refuser les textes comme une vérité révélée et les philo­sophes comme des Saints à révérer. En toute logique, il faut appli­quer ce point de vue à sa pensée. Mais les gens ont besoin de Guide même quand celui-ci explique qu’il faut se méfier des Guides :-). J’ai beaucoup aimé ses premières années de la Contre Philo­so­phie qui me permet­tait de me culti­ver un peu mais en attaquant les périodes plus proches, je trouve que ça tangue fort. De toute manière, je suis mal placé pour ronchon­ner vu ma faible – le mot est faible – culture philosophique.

  17. Pour parler de tout autre chose (une fois de plus!!), ce n’est pas sur ton blog, que j’avais lu un truc sur ”Battler Britton”, ces petits comics d’avia­tion de guerre anglais ou GB(?), à propos d’une histoire dessi­née par Pratt, dans un n° de 1960 ? Je l’ai rêvé ou bien ? Pas trouvé sur le blog en tout cas.

  18. Je ne pense pas que ça ait été publié en poche en France à part les éditions récentes. Et tu as rêvé en effet.

  19. Si, il a publié d’abord en Angle­terre, puis un peu plus tard les mêmes histoires en France, traduites. Onze histoires sur petits formats minces aux éditions Impéria (on trouvait ça dans les halls de gare notam­ment. Mais atten­tion les traduc­tions ! Je me rappelle avoir eu des ”Rapaces” dans les années 60…), cf le lien wiki que j’ai mis ci-dessus.Douze histoires sont ressor­ties en 2009, en version intégrale (42,75€ sur Amazon)Bon, où ai-je vu ce post ? Chez Raymond peut-être…

  20. Les petits formats de PRATT sont des adaptations,remontées,formatées,déchiquetées,martyrisées,mais libérées dont quelques exemples figurent dans le HOP ! n°100(Dossier princi­pal Giraud à ses débuts)On trouve ainsi du Pratt dans AKIM,LANCELOT,ATTACK,NAVY,KWAI,ZORRO SPECIAL,JIM TAUREAU,PANACHE(ainsi ”Mer de feu”que Pratt a repen­sé pour l’album,à coups d’applats typiques)Raymond a certai­ne­ment évoqué cette maison FLEETWAY pour lesquelles ont colla­bo­ré beaucoup d’Italiens(dés 1959 en France,mais pas que ces travaux là de Pratt)…Détail:Pour les traductions,parfois,inversements des roles,nationalités.Mais oui.(Dossier établi par Petit­faux et Gérard Thomassian)Tsss.Encore des lectures de voyous…

  21. Vu le tritu­rage cité par Julien, ça me fait une raison de plus d’espé­rer un jour tomber sur des origi­naux, tel le n° 30 de Battler Britton par exemple. Mais hélas, on trouve beaucoup plus de fasci­cules des années 70 et 80 que des 60…

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